Les portes du possible (Benoît Peeters / François Schuiten)

Publié le par Stéphanie MAYADE

Je suis une adepte de Benoît Peeters, écrivain et scénariste BD, et François Schuiten, dessinateur, mais vous ne le savez pas encore... car je n'ai jamais écrit de critiques sur Les Cités obscures, leur série-phare, et à peine sur le reste : une critique sur une expo montée par François Schuiten au Musée des Arts et Métiers à Paris, et c'est bien tout. Et pourtant, et pourtant... Je les lis depuis 1992, sans compter que j'aime beaucoup écouter Benoît Peeters lorsqu'il intervient sur divers sujets dans des émissions de Radio France.

 

 

Donc, on ne parlera pas ici des désormais célèbres Cités obscures, mais de leur projet voisin et parallèle qui explore des futurs possibles, utopiques ou dystopiques. Est-ce que Les Portes du possible (indûment rangé dans la case "Cités obscures" sur la fiche Wikipédia de Benoît Peeters, ah la la !) a été le départ de ce projet ? J'avoue que je ne sais plus très bien, vu qu'il n'est pas toujours aisé de s'y retrouver dans toutes les productions de ce duo. Car non contents de sortir des BD régulièrement depuis les années 80, ainsi que des ouvrages aux formats originaux (sortes d'albums pour adultes illustrés), ils travaillent dans de nombreuses directions.

 

 

À quoi ressemble donc cet album que je viens tout juste de relire, et qui n'est pas une BD ? (Ne vous fiez pas aux étiquettes trompeuses de la fiche Babelio, malheureux !) C'est un grand livre, de la taille d'un livre d'art, mais cartonné comme les albums pour les tout petits, et qui doit se tourner pour être lu. Vous vous trouvez alors devant des double-pages de grands articles de presse. C'est donc un journal que tenez en main, ou du moins quelques archives d'un journal (qui sait ?), journal qui semble bel et bien belge, et dont les envoyés spéciaux ont parcouru la planète pour rapporter des évènements concernant la mutation des villes, l'architecture (deux sujets auxquels nous ont habitués Les Cités obscures), mais aussi l'écologie, les modes de transport, la génétique, le rapport des humains à la nature et aux animaux, les crises sociales et sociétales, la crise de l'eau, le changement climatique, et j'en passe. On nous propose vingt articles issus d'un futur possible, ou plutôt de nombreux futurs possibles, dans un parfait désordre chronologique, datant de 2011 à 2046.

 

 

Vous avez compris : tous les sujets d'actualité aujourd'hui, et déjà d'actualité en 2005 (date de publication de l'album), sont traités ici, à travers les dessins toujours aussi léchés de François Schuiten et les textes malicieux de Benoît Peeters. En effet, ce n'est pas parce qu'on parle de sujets tout à fait sérieux qu'on ne peut pas les traiter avec humour ; et de l'humour, cet album n'en manque certes pas ! J'ai repéré pas mal de clins d'œil, d'un Tintin tout droit sorti de Tintin au Congo à l'allusion au psychanalyste Serge Tisseron (qui a écrit, comme Benoît Peeters, sur Hergé), en passant par la référence à E.P. Jacobs via un texte parlant d'une faute d'orthographe aux fâcheuses conséquences (château de "Trou Salé" au lieu de "Troussalay")... Ceux qui ont lu S.O.S. Météores comprendront ! Et les autres doivent absolument lire cet album de Blake et Mortimer, ça va de soi. Bref, j'ai l'impression que nos deux compères se sont un peu plus lâché que d'habitude (et je suis presque sûre qu'on voit Benoît Peeters dessiné dans une des illustrations). En tout cas, je suis certaine qu'on peut trouver pas mal de nouveaux clins d'œil à chaque lecture.

 

 

Les Portes du possible est par conséquent un bel objet, un bel album comme Peeters et Schuiten nous y ont habitués, drôle (ce qui est moins habituel), et qui pose beaucoup de questions sur l'avenir que nous bâtissons actuellement et sur le monde dans lequel nous voulons vivre... ou bien sur le monde dans lequel nous ne voulons surtout pas vivre.

 

 

 

 

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