Hilda (Marie NDiaye)

Publié le par Cthulie-la-Mignonne

Première et dernière fois que je lis Marie NDiaye. Hilda, c'est l'image même de la pièce qui se veut intelligente, originale et critique, et qui n'est qu'une grossière caricature d'un sujet que l'auteure ne connaît pas - car on ne me fera pas croire que quelqu'un qui est allée dans un lycée huppé, a été "repérée" à 17 ans par le directeur des Éditions de Minuit (tu parles, comme s'il était tombé par hasard sur elle), connaît quoi que ce soit des smicards, des bonniches et du travail au noir. Donc on repassera pour la leçon de morale sur les riches qui exploitent les pauvres, vu que, merci bien, on est extrêmement nombreux à être au courant depuis fort longtemps. Mais peut-être que Marie NDiaye venait, elle, tout juste de découvrir les choses en 1999, quand elle a écrit Hilda.

 

 

Une pièce qui n'a pas dû lui demandé beaucoup d'efforts, par ailleurs. Trois personnages, mais en fait un seul qui parle tout le temps : Mme Lemarchand, bourgeoise qui se dit de gauche, et qui va embaucher, exploiter et vampiriser une femme "du peuple", sans que le mari ou la sœur de celle-ci ne réagissent. Donc un long, très long, mais vraiment très très long monologue qui tourne en rond, se répète à l'infini, fatigue, lasse, épuise le lecteur qui attend avec avidité la dernière page pour pouvoir passer à autre chose, n'importe quoi, mais vite, vite, qu'il soit enfin délivré de cette pièce narcissique où l'on sent un peu trop que l'auteure se trouve très très maligne. Six scènes qui n'en finissent plus, censées monter en tension sans y parvenir, emplies d'un discours d'une affligeante banalité et de clichés navrants. Pour le coup, vingt après l'écriture de la pièce, ça doit beaucoup plaire aux personnes persuadées que ceux qui roulent à vélo, mangent bio et vegan sont forcément ce qu'ils appellent des bobos (terme dénué de toute signification vu qu'on y fourre absolument tout ce qu'on déteste selon le point de vue), riches, hypocrites et de gauche. Alors oui, évidemment, des riches qui se disent de gauche et qui suintent l'hypocrisie, bien sûr que ça existe. Et après ? Ce que je vois dans cette pièce, c'est que Marie NDiaye ne fait absolument rien de son sujet. Or, une pièce se voulant une critique sociale qui va au but, avec le procédé qu'a utilisé NDiaye (c'est-à-dire le monologue qui se répète pour tendre à une fin monstrueuse), c'était faisable. Mais dans une forme courte, et avec un peu de finesse, si c'était pas trop demander. Seulement voilà, une pièce courte, c'est difficile à faire jouer de nos jours (et n'aide pas à accéder à la célébrité), donc ça traîne, ça traîne... Mais je suis persuadée que de toute façon, même en faisant court, NDiaye se serait plantée, parce qu'il me paraît évident qu'elle ne possède pas du tout l'acuité nécessaire pour s'attaquer à ce genre de sujet.

 

 

On parle quand même de quelqu'un qui fait des déclarations fracassantes à la presse, du style "Sarkozy est un monstre", et qui se tire en 2007 (avec son mari et son petit pécule d'écrivain qui vit dans le confort) à Berlin, où on peut se payer des logements avec tout l'espace nécessaire pour une somme fort intéressante. Donc les discours de gauche de NDiaye, qui passe d'un pays de droite ultra-libéral à un pays de droite ultra-libéral, et qui laisse tomber ses concitoyens qui, eux, vont payer les pots cassés à sa place... eh ben je m'en passe très bien, de ce type de discours, en fait.

 

 

En bref, c'est mauvais d'un point de vue formel : NDiaye ne réfléchit pas en dramaturge, elle ne fait que reprendre, mais de façon maladroite, malavisée et sans intérêt, un procédé déjà utilisé par des dramaturges de talent. Et c'est mauvais sur le fond, parce que NDiaye n'a rien à dire sur les inégalités sociales qui ne soient pas des banalités et des formules creuses.

 

 

Sur ce, je vais me regarder un film de Tarantino, parce que l'obsession de Mme Lemarchand pour le prénom Hilda m'a rappelé le dialogue entre Schultz et Django sur le prénom Broomhilda dans Django Unchained. Il y a des priorités dans la vie, et il est clair que pour moi, Tarantino l'emporte sans conteste sur l'insipide (et hypocrite, à mon sens) Marie NDiaye.

 

 

 

 

Publié dans Théâtre, Littérature

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